Magazine Curium

Publié le: 14 septembre 2017

Auteur: Julie Champagne


Entrevue entre Julie Champagne et Jocelyn Morettini, M.Ps.

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Carrie est la souffre-douleur de son école. En larmes et en sang dans les douches du vestiaire, ridiculisée par les autres filles qui lui lancent des tampons, elle se découvre un pouvoir terrifiant : elle peut contrôler les objets et les gens par la pensée.

Claquer les portes, faire éclater les pneus d’une voiture, pousser une assaillante, provoquer un feu… Il lui suffit de canaliser son énergie mentale en action volontaire, sans rien toucher. Son esprit transcende la matière.

Juste dans les films ?
Popularisée par le roman Carrie de Stephen King, dont l’histoire a été reprise au cinéma en 2013 avec Chloë Grace Moretz, la télékinésie captive les adeptes du paranormal. Et si certains élus pouvaient véritablement utiliser leur force mentale pour contrôler ce qui les entoure ?

Après tout, le cerveau est un organe complexe qui est loin d’avoir livré tous ses secrets. Depuis des décennies, une théorie persistante stipule même que 10 % de notre potentiel cognitif serait utilisé. Quelles merveilles pourrait-on accomplir si on exploitait les 90 % restants, ceux qui seraient en dormance au quotidien ? Des habiletés comme la télékinésie pourraient-elles émerger chez les personnes plus sensibles et évoluées ?

Pas selon la science
« Il n’existe encore aucune preuve pouvant démontrer l’existence de la télékinésie, affirme Jocelyn Morettini, psychologue et neuropsychologue. Il est également faux de croire qu’on utilise seulement 10 % de notre cerveau. On serait en mort cérébrale depuis longtemps ! On exploite l’ensemble de notre cerveau, en tout temps. Les zones s’activent simplement de manière différente selon la tâche à accomplir. »

En clair, malgré les avancées des neurosciences et des techniques d’imagerie cérébrale, les chercheurs n’ont rien trouvé, pas même l’ombre d’un indice, qui pourrait valider ce type de super-capacités cognitives.

Spiritisme, magie et charlatanisme
Il faut se reporter aux beaux jours du spiritisme, à la fin du 19e siècle, pour retracer les débuts de la télékinésie. Les médiums ont la cote et se positionnent comme les interprètes officiels de l’au-delà. Possédés par l’esprit des disparus, ils ont le pouvoir de déplacer des objets par la force de la pensée. C’est du moins leur prétention. Le magicien Harry Houdini, un redoutable sceptique, part en guerre contre ces imposteurs. Il dévoile tous leurs subterfuges et relègue la télékinésie au rang de supercherie.

Le sujet revient d’actualité dans les années 1930, quand un chercheur américain tente de prouver qu’un individu peut contrôler des évènements aléatoires. Les candidats tentent ainsi d’influencer les résultats d’un lancer de dés. La méthodologie est douteuse et les résultats peu convaincants, mais ces travaux suffisent pour relancer le débat.

Un don pour la fraude ?
Dans les années 70, le voyant international Uri Geller fait fortune en prétendant avoir des pouvoirs télékinésiques. Sa spécialité ? Tordre des cuillères ! Si ses performances sont époustouflantes en spectacle ou à la télévision, il refuse de se plier à un protocole scientifique rigoureux. En 2008, il avoue être un simple prestidigitateur.

La télékinésie existe ! (genre)
L’esprit humain ne peut manipuler un objet matériel par la pensée… à moins d’y ajouter une interface cerveau-machine !

« Certaines cognitions de base, comme bouger un doigt, peuvent se détecter avec des électrodes collées sur le crâne ou implantées directement dans les zones cérébrales, explique Jocelyn Morettini. Les neurones ne produisent pas d’électricité à proprement parler. C’est le mouvement des ions à l’intérieur du neurone qui crée un champ magnétique détectable. »

Quand des millions de neurones se déchargent en même temps, à certains endroits du cerveau et d’une certaine manière, les scientifiques peuvent décoder la pensée associée – un mouvement vers la droite, un index qui descend, un bras qui monte…

« Au début, on pouvait seulement déplacer un curseur de gauche à droite ou de bas en haut, dit Jocelyn Morettini. La science a fait des progrès. On peut faire bouger une main robotique simplement par la pensée, par exemple. »

Ces travaux exigent beaucoup des mathématiciens, des physiciens et des neurologues, mais la puissance algorithmique des ordinateurs et les technologies fines promettent des débouchés excitants.

De la télékinésie ? Bon d’accord, pas exactement. Mais tout aussi fascinant !

Texte : Julie Champagne